DE LA DAMNATION RÉGRESSIVE DES ÉLITES SUR LES MARCHÉS :
La grande dérive qualitative du système sociétal contemporain, provient d’une nouvelle dégradation supplétive qui s’est emparée de ses élites et a entraîné un retournement de leur attitude, dans tous leurs modèles et icônes, tels que promus par les leaders d’opinion.
En effet ces derniers, jusqu’à récemment tenaient à exercer un rôle d’éclaireur et une responsabilité d’instigateurs de tendance, qui constituaient en soi une digue due aux pulsions ignorantes et aux goûts candides de la population.
Depuis le phénomène de massification économique des marchés de la consommation des biens et services, ces élites, nonobstant leur capital d’influence acquise, et parce que devenus inquiets de vouloir toujours plus fédérer autour d’elles, n’ont plus aucunement cherché – au niveau qui était le leur, et dans leurs domaines particuliers d’influence – à élever le niveau de l’offre et de la demande ambiante : cycle de création / production / distribution.
Au contraire ces élites sont devenues les forces qui contribuent le plus à les rabaisser, afin de rester en prise avec le plus grand bassin d’audience et de consommation possible, que sont ces masses réceptives et incultes, entretemps rendues planétaires.
La raison en est la pandémie démagogique, qui est parvenue à contaminer la pyramide sociétale, jusqu’à son sommet : intellectuels, chercheurs, créateurs, stars médiatiques, grandes marques !
… Mais ces icônes, consacrées pour leurs compétences ou qualités, n’ont-elles donc pas besoin de se maintenir élevées… ? Pourquoi ne profitent-elles pas de leur position établie et donc de leur influence, pour favoriser l’élévation du niveau des échanges qu’elles arbitrent ?
Pourquoi n’offrent-elles pas aux populations qui les suivent une opportunité de pensée, de créations et produits susceptibles de les émanciper ? Tout simplement parce que ces élites sont devenues elles-mêmes calculatrices, c’est-à-dire dévorées par l’assentiment du nombre, plus que par l’extension potentielle de leur qualité d’influence. Si jadis cette dernière s’affirmait et opérait dans un mouvement tendant vers le haut, une inversion insidieuse s’est produite dans la modernité virale, qui a fait basculer – vers le bas – les règles du jeu… et donc ces élites elles-mêmes qui les régulent.
À présent l’ambition de ces influenceurs, détenteurs du marché, n’est plus que celle d’élargir leur base numérique sans autre attente ou scrupule (sauf de la part de quelques exceptions moins visibles) et certes plus de s’affubler d’une posture d’élévation.
Car l’accroissement potentiel de leur marché (comme de tous les marchés par définition) ne se trouve surement pas vers le haut, mais bien vers le bas de sa massification : les icônes référentielles / détentrices des tendances, ont donc décidé de suivre tout au contraire, les tendances remontées du bas de la demande des masses, et des impulses créatifs sortis tout-bruts de la non-culture numériquement dominante.
Ces élites dans leur majorité, ne sont donc plus préoccupées que de reconquérir, recruter et embrigader de nouveaux suiveurs, situés au bas de leur échelle d’audience, puisqu’elles savent que c’est de cette masse de pure adjonction quantitative – de prescripteurs et de like … peu importe leur niveau, que sera maintenue leur influence et leur durabilité.
Ce socle du bas, en perpétuel renouvellement, est celui qui doit être en permanence maintenu et prioritairement renouvelé… C’est donc lui et lui seul qui dicte les évolutions réelles ou simulées des tendances, des styles, des pensées, des postures et carrières … et non la validité référentielle de leur substance et de leurs contenus.
En fait cette gigantesque dérive démagogique des marchés des produits et services est parfaitement cohérente du point de vue de sa consolidation commerciale… !
Qu’auraient en effet ces décideurs, de plus à attendre d’une élévation de leurs cibles, moyennant une élévation discriminative de leur valeur de référence ? Aucune progression numérique et guère plus qu’une infime reconnaissance sur leur démographie.
Courbes d’attention et d’audiences, susceptibles de produire un déficit et de creuser un éloignement risqué avec une aptitude réceptive en baisse constante, parce que toujours plus orgueilleuse et revendicative de sa propre mythologie d’ambition. Cette mythologie produit légitimement sa vision, son esthétique et sa morale en relation directe avec ses valeurs et son vécu : ce sont ceux-là mêmes qui se reflètent dans les médias sociaux, tels des dictats massifs d’opinion.
Ils exhalent directement la vision et les valeurs des plus nombreux et des plus bruyants auxquels s’agréger, ces dernières jeunes générations, agents objectifs qui détiennent désormais de fait les leviers les plus réactifs du marché, du fait de leur mode de consommation pulsionnelle et la force prescriptrice de leur viralité !